Je n’ai pas hâte de partir de chez Bruno, d’abord parce qu’on y est bien, on mange bien, Christine et Bruno sont adorables, Honoré est avec deux gentilles copines qui lui laissent l’abri et le foin. Mais aussi parce que ce matin il a gelé à -2,5° et que le thermomètre ne remonte pas. Bruno nous accompagne avec son chien adorable, Honoré est plutôt sage au départ puis recommence à tirer brutalement. Il tire si fort que la seconde fois, je tombe. La douleur est violente mais je dois me relever. Dans la journée je dois passer à Brionne, il y a un véto, j’irai le voir, ce n’est pas normal qu’il tire comme ça. Le brouillard givrant ne se lève pas, dommage, le paysage doit être joli par ici. Mais difficile de trouver un site pour déjeuner. Finalement, c’est dans la forêt que nous faisons la pause et que Bruno prend le chemin du retour. J’espère avoir l’occasion de le revoir un jour.
Nous, on va voir le véto. J’y suis agréablement accueilli et la docteur ausculte soigneusement Honoré, qui semble apprécier. Il a même droit à une séance d’ostéopathie. La visite est offerte par le cabinet, touché par notre démarche écologique. Il aura droit à son vermifuge et une carotte. On reprend la route, j’ai réussi à me réchauffer au cabinet et le brouillard épaissi, il faut trouver rapidement un bivouac. Des clients du véto me proposent d’aller chez eux, mais trop loin et dans la direction opposée. Je trouve sur les hauteurs de la ville dans le jardin d’une famille nombreuse. Je suis accueilli par Jessica, la maman et les enfants viennent nous voir : Gwendoline la plus grande, Maïlys, Lou et Nyno. Noan et le papa Grégory arrivent un peu plus tard. On respecte les gestes barrières, Jessica a contracté le COVID et Maïlys est positive. Au départ j’ai un bon café bien chaud et Honoré se voit donner des carottes par les enfants. C’est un jeu pour les enfants et Honoré adore ce jeu.
Il fait moins froid aujourd’hui mais les doigts sont toujours engourdis, autant aux mains qu’aux pieds. D’ailleurs les engelures sont revenus, ce qui complique la marche. Heureusement aujourd’hui Honoré est bien plus sage. Nous passerons la majeure partie de la journée sur la voie verte. Ça faisait longtemps que nous n’avions pas marché sur ce genre de chemin calme. On a dû croiser deux joggers dans toute la journée, après être passé sous un viaduc sur lequel circule l’A28. Le viaduc était d’ailleurs très impressionnant par sa hauteur et sa longueur et en-dessous raisonnent les roues des camions passant sur les joints de dilatation. Concernant les déchets, comme sur toutes les voies vertes j’en trouve peu et se sont à 70 % des déchets accidentels. Heureusement car aujourd’hui je ne suis pas très motivé à les ramasser à cause des doigts trop engourdis pour utiliser la pince. Les douleurs causée par les engelures sont vite insupportables et donc je décide d’écourter la journée de marche et chercher un bivouac. Ce sera derrière la salle des fêtes de Villez-sur-le-Neubourg. Je suis accueilli par Chantal, ancienne employée communale qui me donne le numéro du maire. L’élu passe m’ouvrir la cuisine afin que j’ai accès à l’eau et il allume le chauffe-eau. Il me confie la clé qu’il récupère le lendemain matin avant de prendre une photo pour le bulletin municipal. Je rattrape la voie verte. Le temps est plus dégagé mais le vent est froid. Les engelures aux orteils sont insupportables. On doit aujourd’hui traverser Le Neubourg, j’espère y trouver de la terre de diatomée pour un traitement préventif contre les insectes. Mais personne ne connait ça par ici, même pas les magasins Bio. Je cherche aussi une mercerie pour changer la boucle de ceinture que j’ai cassé. Y’a pas ! Tant pi je commande sur Internet, de toutes façons ça sera moins cher chez Déco cuir. Après la ville, le désert de la voie verte. Tout droit, tout plat, venteux, froid. Et dire que certains pensent que je m’amuse . N’empêche que cumulé avec les engelures et les hernies discales réveillées par le comportement d’Honoré ces derniers jours, il y a de quoi douter. Mais non, je garde le moral et l’envie grâce à toutes les belles rencontres faites depuis mon départ. Je sais qu’il m’en reste encore beaucoup à faire, je ne vais pas céder maintenant !
Difficile de trouver un bivouac par ici, j’ai même vu des gens tondre leur gazon, oui, en janvier. Ça n’existe pas chez nous ça ! Bref direction la mairie qui m’envoie à côté du cimetière. Pas grave je ne peux pas aller plus loin. La pluie a eu la bonne idée d’attendre que je sois installé pour tomber. Qui dit pluie, dit tente mouillée au démontage. Ça faisait longtemps… Et le brouillard est épais ce matin, je marche avec la frontale que j’allume à chaque fois qu’une voiture approche. Heureusement on rattrape vite un joli chemin vallonné. Enfin joli j’imagine, parce qu’on n’y voit rien. Ha j’oubliais, le chemin est humide aussi, on est en Normandie quand même. En pleine forêt je dois bifurquer, le chemin que j’avais choisi est barré, privé. Détour par la route. Puis les vallons laissent à nouveau place à un grand plateau. Avec le brouillard, c’est triste. Les pieds et le dos sont douloureux, il faut s’arrêter. D’autant que le prochain village serait trop loin. Je cherche un bivouac mais il est tôt, tout le monde est au travail. Je vais à la mairie. Fermée. Je cherche sur internet le nom du maire, je viens de passer devant chez lui. J’y vais, sa femme ne veut pas de moi chez elle et quand je demande un terrain communal, elle me dit qu’elle ne sait pas. C’est ça, fout toi de moi ! Bon je m’en vais parce que je vais être désagréable. Heureusement que ce genre de personne est rare. Plus loin une voiture s’arrête dans la cour, Alan me propose son jardin. Je m’installe, me repose quelques instants, dîne et m’apprête à faire ma toilette quand Alan et sa compagne Andréa arrivent. Flûte, trop tard pour la pizza, mais une bonne bière je ne refuse pas. Ni la douche. Je vais vite me coucher, il ne fait pas trop froid et la pluie est annoncée. Et ici la pluie a la bonne idée de tomber la nuit. J’apprécie de marcher au sec. Un petit café et c’est le départ pour la ville de Louviers. Comme dit la comptine, je n’ai pas vu de cantonnier sur la route de Louvier, mais un âne bâté.