La journée avait plutôt mal commencée avec une erreur d’itinéraire. Enfin, un détour inutile pour aller à la supérette qui risque d’être fermée ce dimanche matin. Heureusement une riveraine randonneuse indique qu’il y a une autre supérette dont elle est sûre qu’elle est ouverte. Demi-tour, petit crochet par la fameuse supérette puis retour sur le GR7. Ça descend sec et en bas, chicane anti-cyclos et escalier. Non ! Impossible de faire demi-tour, on débâte, faut que ça passe. Honoré joue bien le jeu, ouf. Mais après la descente, ça remonte. Et sérieusement. On quitte enfin la route pour un charmant chemin, mais à nouveau, chicane anti-cyclos. Grrrr ! Je débâte, rebâte, remonte 500 mètres et re-chicane ! Heu comment dire… Ça fait chier et j’espère que ça va pas être comme ça toute la journée ! Bon, heureusement, c’était la dernière. Mais ensuite ça grimpe plein sud, donc au soleil. Et avec le temps perdu à débâter et rebâter, ben du coup on monte au soleil et sous la chaleur déjà écrasante. Dire que je me plaignais du plat de l’Eure ou de la Marne, ben figurez-vous qu’aujourd’hui ça me manquerait presque, un peu de plat. Je dis presque parce que marcher sans ombre c’est pas mieux que les forts dénivelés. Au moins de temps en temps il y a de l’ombre. Ce soir, on écourte l’étape. Je demande à un couple d’agriculteurs s’il y a de l’eau au point que j’avais repéré sur la carte, ils m’assurent que non et nous proposent de bivouaquer dans le pré que les vaches viennent de quitter. Parfait, il y a de l’ombre, le sol est assez plat et la dame, dont j’ai oublié de demander le prénom, nous propose la douche. Je peux même recharger la batterie, le panneau solaire a chaud et comme on cherche l’ombre, il est moins efficace.
Et ce matin, café et cake au citron maison. Encore pas mal de dénivelés aujourd’hui, la traversée d’un joli village médiéval nommé Rochefort. J’avais déjà traversé un Rochefort-en-Terre en Bretagne, classé « Un des plus beaux villages de France ». Le mal au dos m’interdit de rester immobile avec le poids du sac le temps de ramasser les déchets, et puis avec les dénivelés peu stables, ce n’est pas prudent. Il y a beaucoup de serres et de tunnel par ici. Je pensais la culture de fruits rouges plus dans la Drôme, mais les altitudes d’ici le permettent aussi. La vue du haut de Saint-André-la-Côte est magnifique sur la vallée du Rhône. Dommage que le temps vire à l’orage, on distingue à peine les Alpes. Hier soir on pouvait entrevoir jusqu’au Vercors.
Ce soir bivouac à Sainte-Catherine près d’un étang. La journée qui suit est un peu particulière, c’est le dernier jour de marche avec Christine et Jaka. Même si on savait que ce jour arriverait, on ne savait pas que ce serait aujourd’hui. Mais définitivement, notre bulle est impénétrable, mon caractère de vieux con solitaire, pas fait pour supporter un autre bipède (enfin pas trop longtemps). La pauvre Christine préfère interrompre son aventure, et je la comprend bien.
Sinon la journée était encore belle, un peu plus fraîche et ça a fait beaucoup de bien. Sur les crêtes on pouvait voir d’un côté la vallée du Rhône jusqu’aux Alpes, de l’autre le Livradois Forez et en face le parc naturel régional du Pilat. Nous arrivons à Valfleury, un nom évocateur et bien porté par cette jolie commune. Le village est consacré à la Vierge, de l’église et sa crypte au chemin de croix et aux oratoires. Bref c’est beau mais il a été difficile de trouver un emplacement plat pour les tentes.
Pour la première fois depuis notre départ, aujourd’hui je fais demi-tour. Bien avant de partir faire ce tour de France, j’avais repéré une ferme à louer dans le coin, mais je ne sais pas pourquoi la visite ne s’est jamais faite. Et comme par hasard, alors que je continue mes recherches pour redémarrer une activité agricole tout en parcourant la France, je retombe sur cette annonce et il se trouve que la responsable de répertoire installation du Rhône, rentre de vacances aujourd’hui. Je lui laisse donc un message, explique à ma situation et dans l’après-midi même, je reçois les coordonnées des propriétaires de la ferme. Ce matin, alors que Christine quitte l’aventure, je retourne sur mes pas pour aller visiter cette ferme à 25 km de ma position actuelle. La journée de marche est longue et chaude et j’arrive tard sur la ferme. Autant dire que je n’ai plus de courage pour visiter, une bonne douche et un repas suffiront. Je suis chez Bernadette et Alain, éleveurs d’ovins viande dans la vallée du Gier. Je profite d’être là pour faire du wwoofing, qui sait ça peut être amusant de faire du wwoofing dans ma future ferme… Avec ces chaleurs, le travail est plutôt matinal, c’est l’occasion de faire quelques courses l’après-midi et faire ressemeler mes chaussures pour la seconde fois (enfin pour cette paire là) et c’est Bernadette qui s’est occupé de tout. Merci Bernadette. L’entente est plutôt bonne avec le couple, je peux rester quelques jours à la ferme et modifier mon itinéraire pour rejoindre mon trajet. Ou en découvrir un autre… Je n’ai plus d’impératif pour rentrer chez moi alors j’en profite. Ha ! Que ce chemin est chargé de surprises !